Des responsables de l’ONU ont averti mardi que le fragile processus de paix au Soudan du Sud se détériore en raison de la montée de la violence, de la paralysie politique et de l’aggravation de la crise humanitaire.
Jean-Pierre Lacroix, sous-secrétaire général des Nations Unies aux opérations de maintien de la paix, a déclaré au Conseil de sécurité que ces derniers mois, la situation évoluait « dans une direction négative et potentiellement dangereuse », avec une augmentation marquée des violations du cessez-le-feu, notamment des bombardements aériens et des affrontements entre signataires de l’Accord de paix revitalisé de 2018.
« Malgré ces défis et le risque d’effondrement, l’Accord de paix revitalisé reste le seul cadre viable pour la paix et la stabilité à long terme au Soudan du Sud », a souligné Lacroix, rappelant que la période transitoire de l’accord doit se terminer après les élections prévues en décembre 2026, tout en avertissant que « des élections crédibles et pacifiques dans les délais de l’accord apparaissent de moins en moins probables ».
Il a exhorté les dirigeants politiques à renouer avec le dialogue et le consensus pour éviter l’effondrement total du processus de paix.
- Situation humanitaire « catastrophique »
Lacroix a décrit la situation humanitaire comme « catastrophique » : plus de 7,5 millions de personnes sont en insécurité alimentaire sévère, dont 28 000 risquent la famine. Les inondations ont déplacé plus d’un million de personnes, et plus de 1,2 million de réfugiés et rapatriés du Soudan sont arrivés dans un pays déjà en difficulté alimentaire.
« Les souffrances humaines continuent de s’accroître. Les violences sexuelles liées au conflit, les détentions arbitraires et les exécutions extrajudiciaires persistent, avec peu de responsabilités », a-t-il déclaré, appelant à la cessation immédiate des hostilités.
Lacroix a conclu en plaidant pour un engagement régional et international renouvelé afin de maintenir en vie le processus de paix fragile. « La mise en œuvre de l’Accord revitalisé reste la seule voie vers la stabilité et la paix durable. Mais le temps presse dangereusement », a-t-il averti.
Il a appelé les parties à « adopter une approche centrée sur les citoyens, renforcer leur engagement envers l’inclusion politique et cesser les actions unilatérales », tout en exhortant la communauté internationale à rester unie et engagée.
- Les femmes et les filles sont « les plus touchées au quotidien »
Sima Sami Bahous, directrice exécutive d’ONU Femmes, a déclaré que le chemin du Soudan du Sud vers la paix et le développement est entravé par l’instabilité politique, les crises humanitaires et la fragilité socio-économique.
« Le pays souffre d’institutions affaiblies et peine à maintenir la cohésion sociale, tandis que la guerre en cours au Soudan voisin déstabilise encore sa transition fragile », a-t-elle expliqué au Conseil de sécurité.
Comme toujours en temps de crise et de conflit, les femmes et les filles sont « les plus touchées chaque jour ».
« Elles font face à des défis climatiques incessants, à l’insécurité alimentaire, aux violences sexuelles, aux enlèvements et plus encore », a ajouté Bahous.
Le Soudan du Sud présente l’un des taux les plus élevés de violences sexistes dans la région, avec environ 2,7 millions de personnes à risque, a-t-elle souligné.
Bahous a également rappelé aux États membres que tout désengagement des opérations de maintien de la paix aurait un impact particulièrement lourd sur les femmes et les filles : « Nous leur devons mieux. »
Elle a insisté sur la nécessité de faire de la participation des femmes à tous les niveaux de la vie sociale et politique une norme.
« Il n’existe tout simplement pas de voie plus éprouvée vers une paix durable que le leadership des femmes et leur inclusion réelle dans la résolution des conflits », a-t-elle conclu. [AA]